Prédication culte du 22 octobre 2023 par le pasteur Claude Missidimbazi
« Voici la menace dont le prophète Habaquq eut la vision : – Jusques à quand, Éternel, Appellerai-je au secours Sans que tu écoutes, Te crierai-je : Violence ! Sans que tu sauves ? Pourquoi me fais-tu voir le mal Et regardes-tu l’oppression ? Pillage et violence sont devant moi, Il y a contestation, Et la dispute s’élève. C’est pourquoi la loi est paralysée, Et le droit n’est jamais établi, Car le méchant assaille le juste, C’est pourquoi un droit perverti s’établit.
[…]
Je vais prendre mon tour de garde, Je vais me tenir sur le rempart; Je vais guetter pour voir ce qu’il me dira, Et ce que je répliquerai au sujet de mes doléances. L’Éternel me répondit en ces termes : Écris une vision, Grave-la sur les tablettes, Afin qu’on la lise couramment. Car c’est une vision dont l’échéance est fixée, Elle aspire à son terme, Elle ne décevra pas. Si elle tarde, attends-la, Car elle s’accomplira certainement, Elle ne sera pas différée. Voici que son âme est enflée, Elle n’est pas droite en lui, Mais le juste vivra par sa foi. Certes le vin est traître : L’homme hautain ne reste pas tranquille, Il élargit sa gorge comme le séjour des morts. Comme la mort, il est insatiable. Il attire à lui toutes les nations, Il assemble auprès de lui tous les peuples. »
Habacuc 1.1-4; 2.1-5
Introduction
Parfois on a l’impression que l’Écriture a été écrite hier, dans notre contexte et qu’Elle nous est directement adressée.
Le prophète Habacuc a vécu il y a bien longtemps, dans les décennies qui ont précédé la destruction de Jérusalem par les babyloniens, alors que tout déjà s’écroulait. Pourtant ce qu’il décrit semble si contemporain : «Pourquoi me fais-tu voir l’iniquité et contemples-tu l’injustice ? Pourquoi l’oppression et la violence sont-elles devant moi ? » (v.3)
On se demande souvent pourquoi Dieu n’intervient pas. Quelqu’un a écrit : « Un Ciel silencieux est le plus grand mystère de notre existence. » Pourtant, face au mal, Dieu a une réponse. Il nous demande de comprendre la situation dans laquelle nous sommes.
Le contexte d’Habacuc
Le prophète Habacuc décrit la réalité dans laquelle il vit alors.
v.1-4 « Jusques à quand, Éternel, appellerai-je au secours sans que tu écoutes, Te crierai-je : Violence ! Sans que tu sauves ? Pourquoi me fais-tu voir le mal et regardes-tu l’oppression ? Pillage et violence sont devant moi, il y a contestation, et la dispute s’élève. »
Le prophète crie à la violence. Il est tiraillé entre sa théologie et la réalité qu’il vit. il fait ainsi des reproches à Dieu, il ne comprend pas Son inaction, Son silence, Son indifférence. Le langage que le prophète Habacuc utilise est riche de sens : il parle de violence, de méfaits, de troubles, de destruction, de querelles, de disputes… Il vivait dans une société où les gens étaient dévorées par l’angoisse, la peur, où les institutions étaient défaillantes et où les gens donc prenaient les choses en main et se retournaient contre leurs voisins.
Le prophète dans son poème utilise deux fois le terme violence pour caractériser la situation terrible dans laquelle son peuple vivait. Nous pourrions utiliser les mêmes termes pour décrire notre monde actuel en chute libre avec son niveau de rage, sa profonde anxiété, ses peurs et la soif de vengeance.
Notre monde est malade, il y a des guerres partout, il y a de la violence partout, dans les rues, comme dans les familles, avec notamment les violences faites aux femmes.
Ce que la Bible dit de la violence
La Bible est un livre honnête, réaliste et part du principe que le monde déchu est violent, l’humanité en particulier. Dans la Bible, les actes de violence ne sont pas passés sous silence. Lorsque nous les comparons aux mots de nos journalistes contemporains qui vont de superlatif en superlatif, nous constatons qu’il n’y a malheureusement rien de nouveau sous le soleil.
Les actes de violence réprouvées explosent dans les pages des Écritures. Des personnes malveillantes se livrent à des actes inqualifiables :
- Genèse 6.11 nous dit que « la terre était remplie de violence ».
- Nous lisons des récits d’enfants tués, bouillis même (Lamentations 4.10), écrasés contre des rochers (Psaumes 137)
- Lors de l’invasion babylonienne, le roi déchu Sédecias est contraint de regarder ses fils se faire massacrer. Après quoi, ses propres yeux sont arrachés (Jérémie 52).
- Des femmes enceintes sont éventrées (2 Rois 15, Amos 1).
- D’autres femmes sont violées comme Dîna (Genèse 34), ou celle qui est victime d’un viol collectif jusqu’à ce que mort s’ensuive dans Juges 19.
- Les atrocités commises par les militaires sont choquantes, avec des récits d’assassinat à coup de couteau (Juges 3), de décapitation (1 Samuel 17).
- Des cas plus extraordinaires impliquent des tortures et des mutilations, des membres amputés (Juges 1), des corps taillés en pièces (1 Samuel 15), des yeux arrachés (Juges 16), des crânes perforés (Juges 4 & 5), ou écrasés par une meule (Juges 9).
- Même le grand roi David, l’homme selon le cœur de Dieu avait du sang sur les mains : pour être gendre du roi, il a tué deux cents philistins pour enlever leurs prépuces (1 Samuel 18, 2 Rois 10).
- Ailleurs encore : les corps sont pendus (Josué 8), mutilés ou exposés comme des trophées (1 Samuel 31), d’autres ont été piétinés au point d’être méconnaissables (2 Rois 9), détruits par les bêtes sauvages (Josué 13), ou battus avec des ronces (Juges 8).
- Des groupes entiers sont massacrés (1 Samuel 22), ou emmenés en captivité enchaînés les uns aux autres avec des crochets dans les lèvres (Amos 4)
Dans le Nouveau Testament, la violence prend la forme spécifique de la persécution des martyrs. La passion du Christ en est l’exemple suprême.
Dans la description des héros de la foi, dans l’épître aux Hébreux 11.37, nous lisons même : « On les lapidait, on les coupait en deux, on les tuait par l’épée, ils se promenaient vêtus de peaux de brebis, de chèvres, sans ressources, affligés, maltraités… »
Que devons nous penser de la présence de cette violence dans la Bible ?
Une réponse évidente est que la Bible n’est pas un livre qui cache les côtés sordides de la vie. La Bible est un livre authentique, d’un réalisme absolu. Les récits de violence de la Bible démontrent les profondeurs de la dépravation à laquelle la race humaine descend : partout tous les hommes commettent des actes abominables.
Quelqu’un a écrit : « Depuis le début du 21e siècle, les attaqués terroristes se multiplient sur la planète, alors que le siècle dernier, particulièrement meurtrier a été le théâtre des premières guerres mondiales et de plusieurs genocides. »
La violence ne se limite cependant pas à ces conflits armés, et actes terroristes. Elle est partout dans la culture populaire : images, films, jeux vidéos… Elle est dans les paroles, les gestes, les regards…
Parfois c’est la vérité qui déclenche la violence, en raison de l’hostilité qu’elle suscite : les chrétiens sont ainsi persécutés parce qu’ils sont simplement des enfants de Dieu.
La violence fait partie de notre condition humaine déchue. La violence semble avoir toujours été là et être partout. Alors que faire ? Se cacher ? Se barricader ? S’armer ? Adopter partout des dispositifs privés (école, quartier, sécurité, plans de santé, services) pour ne pas être exposés à la violence commune ?
En fait, rien ne peut arrêter la violence qui est dans le cœur de l’homme sauf une véritable conversion !
Il est important d’être réaliste. Notre prière ne doit pas être que les uns et les autres fassent la paix, mais que Dieu sauve et convertissent les cœurs pour que tous naissent de nouveaux et deviennent des artisans de paix.
La réponse de Dieu : une vision
« L’Éternel me répondit en ces termes: Écris une vision, grave-la sur les tablettes, afin qu’on la lise couramment. Car c’est une vision dont l’échéance est fixée, elle aspire à son terme, elle ne décevra pas. Si elle tarde, attends-la, car elle s’accomplira certainement, elle ne sera pas différée.
Voici que son âme est enflée, elle n’est pas droite en lui, mais le juste vivra par sa foi. » (Habaquq 2.2-4)
Le Seigneur répond en donnant une vision. C’est l’affaire du prophète d’offrir à ses contemporains angoissés la vision de Dieu. Le prophète insiste sur le fait que cette vision, fondée sur la foi, est suffisante pour vaincre la violence.
Face à la violence, Dieu propose une vision. L’activité de l’Église consiste à guetter la vision, à l’attendre et à la recevoir. Une fois reçue, la vision de Dieu doit être partagée, lu et connue de tous !
Nous devons accepter, nous soumettre à la vision de Dieu. Cette vision donnée au prophète est incomparable, riche mais peut ne pas nous satisfaire.
Graver la vision sur des tablettes est une allusion à l’épisode où Moïse devait graver les commandements de Dieu sur des tablettes au Sinaï (Exode 20). Dieu demande au prophète de graver cette vision sur des tablettes, pour que tous y est accès facilement, partout, tout le temps, qu’on soit enfants, adultes ou vieillards.
C’est une vision pertinente pour de nombreux jours et pour des générations. Cette vision est pour un temps déterminé. Elle est un appel à la patience et à la fidélité. Il y a une tension entre notre réalité éprouvante et la réponse de Dieu qui parle de vision… C’est incompréhensible parfois pour nous hommes, mais Dieu reste souverain et Il à Son calendrier.
Quand Dieu parle, il nous faut apprendre à attendre. C’est une qualité rare que de savoir attendre :
- Comme Abraham qui a dû attendre l’enfant promis pendant 25 ans.
- De même Moïse a dû apprendre à attendre la manifestation de la révélation De Dieu (Exode 33).
- Idem pour Balaam (Nombres 23) ou Élie (1 Rois 19).
Tous les saints ont dû apprendre à attendre : « Le Seigneur ne retarde pas (l’accomplissement de) sa promesse, comme quelques-uns le pensent. Il use de patience envers vous, il ne veut pas qu’aucun périsse, mais (il veut) que tous arrivent à la repentance. » (2 Pierre 3.9)
En d’autres termes, il peut y avoir une période d’attente : la vision est pour un temps déterminé et pas une minute plus tôt.
Dieu ne calcule pas le temps comme nous. Prenons le temps de nous retirer parfois, pour méditer, prier et attendre l’intervention de Dieu. L’attente du prophète Habacuc n’est pas inhabituelle. Dieu a promis un temps où Il va accomplir Ses promesses.
Le juste vivra par la foi
Qu’est-ce qui peut nous permettre aujourd’hui de vivre et de persévérer dans le temps qui nous sépare de l’accomplissement des promesses ? Il est dit au verset 4 : « Le juste vivra par sa foi », le juste vivra grâce à sa fidélité, sa loyauté envers Dieu.
Dieu nous accorde Sa révélation, une vision du futur, mais il est sûr et certain que nous ne verrons pas tout ce que la Bible a annoncé. Alors Dieu nous donne le moyen d’attendre, de patienter et de rester fidèle.
Le chrétien ne doit jamais succomber : en face de l’apparente inaction divine, c’est sa foi, sa fidélité, sa parfaite loyauté envers Dieu qui le fera vivre. La vision peut sembler tarder d’un point de vue humain, alors que du point de vue divin, sa certitude n’est jamais mis en doute et son accomplissement n’est jamais retardé. Dans le monde spirituel, tout est déjà clair : Dieu connaît la fin.
Persévérons donc dans nos prières même si on a l’impression que rien ne change.
Conclusion
Au milieu d’une violence et d’une injustice sans espoir, le Dieu qui voit l’injustice apportera la justice par Ses voies parfaites mais mystérieuses.
Là où on crée de la peur, l’Evangile apporte l’Espérance : Dieu a tant aimé le monde qu’Il a donné Son Fils unique afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas mais qu’il ait la vie éternelle.
La foi exige d’attendre la justice de Dieu. Dieu jugera le monde mais en attendant Il nous demande d’être patient et de vivre dans la fidélité à Lui.
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